Mont Saint-Michel
Située dans le Pays de l'Avranchin, la commune rurale du Mont Saint-Michel tire son nom de l'îlot rocheux consacré à saint Michel.
Le mont Saint-Michel baigne dans la baie du Mont-Saint-Michel, ouverte sur la Manche. L’îlot atteint 92 m d’altitude et offre une superficie émergée d’environ 7 ha. La partie essentielle du rocher est couverte par l’emprise au sol de l’abbaye du Mont-Saint-Michel et de son domaine. Cet îlot s’élève dans une grande plaine sablonneuse.
Ce site touristique est le plus fréquenté de Normandie et l'un des dix plus fréquentés en France.
L'îlot et le cordon littoral de la baie figurent depuis 1979 sur la liste du Patrimoine Mondial de l’UNESCO ainsi que le moulin de Moidrey depuis 2007. Le mont bénéficie d'une seconde reconnaissance mondiale en tant qu'étape des Chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle en France pour les pèlerins du Nord de l'Europe qui passent par le Mont lorsqu'ils se rendent en Galice. Il est dénommé commune touristique depuis 2009.
Les communes limitrophes sont : Beauvoir et Pontorson. A l'Ouest du Couesnon, les hameaux de Belmontet, Saincey et Camus, et les polders Molinié et Tesnières sont limitrophes de Beauvoir. A l'Est le lieu-dit la Caserne, est enclavé entre les territoires de Beauvoir et de Pontorson.
Hydrographie
La commune est bordée par la Manche.
L'ilôt rocheux est situé à l'Est de l’embouchure du Couesnon qui se jette dans la Manche.
La baie du Mont-Saint-Michel (voir § suivant) est le théâtre des plus grandes marées d’Europe continentale, jusqu’à 15 m de marnage, différence entre basse et haute mers. La mer rejoint ensuite les côtes à la vitesse d’un cheval au galop.
Héraldique
Les armes de la commune se blasonnent ainsi : D'azur aux deux fasces ondées cousues de sinople et aux deux saumons d'argent posés en barre l'un sur l'autre, celui du chef contourné, brochant sur le tout.
Toponymie
A l'origine : in monte qui dicitur Tumba = le mont Tombe, dans le sens de tertre ou élévation ; en 966 : Montem Sancti Michaelis dictum ; en 1025 : loco Sancti Archangelis Michaelis sito in monte qui dicitur Tumba ; en 1026, Saint Michiel del Mont ; au XIIème siècle : Mons Sancti Michaeli in periculo mari = mont Saint-Michel au péril de la mer, appellation en référence au passage des pèlerins traversant la baie à l'origine d'enlisements ou de noyades.
Histoire
Le Mont Tombe est, dès l'origine, un lieu où les hommes se rassemblent. Il est durant l'Antiquité un lieu de cultes druidiques pour les Abrinbcates, peuple gaulois armoricain qui habite la région.
À l’avènement du christianisme, aux alentours du IVème siècle, le Mont Tombe fait partie du diocèse d’Avranches, dont les limites correspondent à l'ancien territoire des Abrincates.
Au milieu du VIème siècle, le christianisme s’implante véritablement dans la baie. Les ermites saint Pair d'Avranches (+565) et saint Scubilion (+565) fondent une chapelle dédiée au premier martyr chrétien du Ier siècle, saint Étienne, élevée à mi-hauteur du rocher et une seconde en l’honneur du premier martyr d'Autun, saint Symphorien (159/179), élevée au pied du rocher.
En 708, Aubert (660/725), évêque d'Avranche, envoie deux chanoines chercher des reliques au sanctuaire italien du Mont-Gargan, fait élever un oratoire en l’honneur de l’archange saint Michel, et installe sur le site une communauté de 12 chanoines pour servir le sanctuaire et accueillir les pèlerins. En 1960, à l'Est de la chapelle Notre-Dame-Sous-Terre, un mur cyclopéen pouvant constituer les vestiges de l'oratoire construit en 708 est mis au jour.
A cette époque, à l'Est du rocher, les premiers villageois qui fuient les raids Vikings, s'installent. Le noyau primitif du village est encore perceptible, il correspond à une zone caractérisée par une organisation parcellaire relativement complexe et un enchevêtrement de constructions desservies par des ruelles tortueuses, c'est le secteur de l'église paroissiale Saint-Pierre et son cimetière. La plupart des habitations sont construites en bois et en torchis.
En 709, un raz de marée engloutit la forêt de Scissy et entoure le mont pour en faire une île.
En 867, le Traité de Compiègne attribue le Cotentin et l'Avranchin au roi de Bretagne, Salomon (+874). Ces deux régions ne font donc pas partie du territoire normand concédé en 911 au chef viking mon ancêtre Rollon (860/932, portrait 1 de gauche). Le mont reste breton, bien que toujours attaché au diocèse d'Avranches, lui-même dans l'antique province ecclésiastique de Rouen, dont la ville principale devient la capitale de la nouvelle Normandie. En 933, mon ancêtre le duc de Normandie Guillaume Ier dit Longue Épée (905/942, portrait 1 de droite) obtient du roi de France un agrandissement de son territoire avec le Cotentin et l'Avranchin. A cette date, le mont est officiellement rattaché à la Normandie.
Mon ancêtre le duc de Normandie, Richard Ier dit Sans Peur (933/996), fils du précédent, poursuit l’œuvre de réforme monastique de son père et ordonne aux chanoines à qui le Mont est confié de renoncer à leur vie dissolue ou de quitter les lieux. Tous partent sauf un, Durand, qui se réforme par amour pour l'archange. En 966, des bénédictins, issus de différentes abbayes, s'installent. Le premier abbé, Maynard Ier, fait édifier l'église préromane Notre-Dame-sous-Terre. Son neveu, Maynard II lui succéde jusqu'en 1009. À cette époque, le Mont scelle la bonne entente entre les deux ducs, de Normandie et de Bretagne, et les ducs de Bretagne de la Maison de Rennes sont inhumés dans la chapelle Saint-Martin de l'Abbaye.
Mon ancêtre le duc de Bretagne Conan Ier dit le Tort (944/992, portrait 2 de gauche) prend le titre de Princeps Britannorum en 990, en présence de l’ensemble des évêques de Bretagne. Mon ancêtre Geoffroi Ier Béranger (974/1008), fils du précédent et époux d'Havoise de Normandie (981/1034), est un grand bienfaiteur de l'abbaye.
En 1030, mon ancêtre le duc de Bretagne Alain III (997/1040) refuse de prêter serment de fidélité et entre en conflit avec son cousin, mon ancêtre le duc de Normandie Robert Ier dit le Magnifique (1010/1035), fils de mon ancêtre le duc de Normandie Richard II dit l'Irascible (972/1026). Leur oncle Robert dit le Danois (+1037), archevêque de Rouen, sert de médiateur lors d'une entrevue au Mont-Saint-Michel et en 1031, Alain III et son frère Eon de Penthièvre font une donation au Mont-Saint-Michel.
Mon ancêtre le duc de Normandie Guillaume dit le Conquérant (1024/1087, portrait 2 de droite) dote l'abbaye du Mont qui a soutenu financièrement sa conquête de l'Angleterre. Mon ancêtre le duc de Normandie Henri Ier Beauclerc (1069/1135) fait bâtir un fort sur le rocher qui est aussitôt assiégé pas ses frères Robert dit Courteheuse (1051/1134) et Guillaume dit le Roux (1060/1100) dans la guerre fratricide qui les opposent.
L'abbaye échappe au grand incendie de 1138 déclenché par les paysans résoltés de l'Avranchin qui ravage le village.
Les alliés bretons du roi Philippe II dit Auguste (1165/1223, portrait 3 de gauche), menés par Guy de Thouars (+1213), incendient le Mont en 1204 en représailles de l’assassinat de son beau-fils Arthur Ier de Bretagne (1187/1203) par le roi d'Angleterre Jean dit sans Terre (1199/1216), et massacrent la population.
L'enceinte fortifiée de la ville est commencée grâce à l'aide financière du roi Louis IX dit saint Louis (1214/1270, portrait 3 de droite) venu en pèlerinage en 1254. Le village, à cette époque, beaucoup plus petit, groupe ses maisons en haut du rocher près de l'entrée de l'abbaye. L'enceinte, qui ne ceinture que le sommet du Mont, est achevée par l'abbé bénédictin Guillaume du Château (+1314).
En 1314, est installée au Mont la première garnison logée par l'abbé dans la porterie et dont la solde est supportée par le roi. Les abbés sont capitaines de la ville et de l'abbaye du Mont-Saint-Michel tout au long du XIVème siècle et s'attachent le service armé de nombreux seigneurs du Cotentin et de l'Avranchin.
En 1386, débute la construction de la tour Perrine, de la barbacane crénelée à double accès fermée par des vantaux basculants, du Grand Degré et de la tour Claudine. Le châtelet avec ses tourelles en encorbellement sur contrefort, est achevé en 1403.
En 1417 après la Bataille d'Azincourt, un rempart pour protéger la ville est érigé, ainsi qu’une grande citerne creusée en roche vive derrière l’abside de l’abbaye pour alimenter le Mont en eau douce. En 1419, Rouen tombe aux mains des Anglais, le Mont est alors la seule ville de Normandie qui résiste à l’occupant qui l'assiègent entre 1423 et 1440, établissant un blocus par la terre et la mer et édifiant deux bastilles sur Tombelaine et Ardevon.
A la Révolution Française, le mont porte le nom de Mont Libre.
Chroniques communales
Le culte à saint Michel et les pèlerinages
Diffusé dès le IVème siècle en Orient, le culte à l'Archange saint Michel prend de l'importance en Occident par l'Italie à partir du Vème siècle. Le rôle guerrier de l'Archange contre les démons et les forces diaboliques évoque dans l'esprit des chrétiens, en ces temps belliqueux, un pouvoir de protection contre le mal. Le sanctuaire créé en 708 sur le mont Tombe par saint Aubert à la suite de l'apparition de l'Archange, participe à l'expansion du culte.
Le premier récit de pèlerin connu est celui du moine Franc Bernard vers 867 qui vient au mont après avoir été à Rome, au Monte Gargano, à Jérusalem et à Bethléem. Un autre pèlerinage est rapporté également au IXème siècle, celui du parricide Ratbert, qui effectue le voyage au mont par pénitence.
Au XIème siècle, l'abbatiale est agrandie et les pélerinages s'intensifient. Mon ancêtre le duc de Normandie Richard II dit l'Irascible (972/1026, portrait 1 de droite) y épouse Judith de Bretagne (982/1017) vers l'an 1000. A partir de cette date, ducs, princes et rois s'intéressent au mont et à la protection de saint Michel.
Le duc de Normandie et roi d'Angleterre Henri II Plantagenêt (1133/1189) vient plusieurs fois au mont après avoir soutenu l'élection de Robert de Thorigny (1110/1186) à la tête de l'abbaye. En 1158, il y rencontre le roi de France Louis VII dit Le Jeune (1120/1180, portrait 1 de gauche) pour une réconciliation éphémère.
Les derniers Capétiens directs sont très assidus envers l'archange : Louis IX dit Saint Louis ; son fils, Philippe III dit Le Hardi (1245/1285) vient y remercier saint Michel de l'avoir préservé au retour de la 8ème croisade ; Philippe IV dit le Bel (1268/1314) y apporte en 1307 et 1310 des reliques provenant de la Sainte-Chapelle.
Les premiers Valois montrent moins de dévotion à l'égard de l'archange mais Charles VI dit Le Fol (1368/1422) s'y rend en 1393 ; Louis XI (1423/1483) y vient à quatre reprises par spiritualité mais aussi par souci de montrer sa présence au voisin breton à l'époque de la Ligue du Bien Public ; François Ier (1494/1547, portrait 2 de droite) s'y rend par deux fois ; en 1561, Charles IX (1550/1574) et son frère, le futur Henri III (1551/1589, portrait 2 de gauche) sont les derniers monarques à y venir en pèlerinage.
Le pélerin appelé Michelet, vient d'Italie, de Bavière ou de Flandre par des routes appelées Chemins de Paradis. Des pèlerinages d'enfants sont relatés à partir du XIVème siècle. Le nombre de pèlerins va croissant jusqu'à la Guerre de Cent Ans, lorsque l'occupation anglaise au début du XVème siècle limite l'accès au rocher.
La promulgation de la Constitution Civile du Clergé lors de la Révolution Française apporte un coup d'arrêt aux pèlerinages. Les ordres religieux sont supprimés et l'abbaye est vidée puis transformée en prison.
Des confréries parviennent à organiser quelques pèlerinages vers l'église paroissiale Saint-Pierre au début du XIXème siècle, l'abbaye restant inaccessible.
La suppression de la prison et la mise à disposition de l'abbaye au culte en 1863 permettent la remise en place des structures destinées à l'accueil de pèlerins, sans pour autant atteindre l'ampleur des flux antérieurs.
Le tourisme
Déjà depuis le XIXème siècle, les auteurs et peintres romantiques viennent au mont, pour son charme unique et ses qualités pittoresques, tel Henry René Albert Guy de Maupassant (1850/1893, portrait de droite).
À la fin du siècle, plusieurs hôtels s'établissent.
Le Mont connaît un déclin de fréquentation depuis le début du XXIème siècle, passant de 3,5 millions de visiteurs à 2,2 millions en 2013. Le site pâtit des nouvelles conditions de desserte de la presqu’île et des prix élevés des prestations médiocres. En 2014, malgré la construction des nouveaux ouvrages d'accès, le déclin touristique se poursuit, en raison de la hausse des tarifs de stationnement, des 50 minutes de la traversée à pied ou des navettes n'effectuant qu’une partie du parcours.
La Baie
Les marées dans la baie ont une amplitude de près de 13m les jours de fort coefficient, la mer se retire à grande vitesse sur une dizaine de kilomètres, mais revient aussi vite. Le mont n’est entouré d'eau et ne redevient une île qu’aux grandes marées d'équinoxe, 53 jours par an, pendant quelques heures.
Construite en 1879, la digue-route submersible qui relie le mont au continent retient le sable et aggrave l’ensablement naturel de la baie. En 1983, le président de la République, François Mitterrand (1916/1996) inaugure les travaux de démolition de la digue. Le projet de désensablement du Mont de 1990, rebaptisé ensuite rétablissement du caractère maritime du mont Saint-Michel, prévoit : le remplacement du parking par un autre situé au Sud du barrage de la Caserne sur le Couesnon à 2,5 Kms du mont, la reconstruction du barrage, la mise en place de navettes spéciales par une nouvelle digue sur les herbus prolongée par un pont-passerelle sur pilotis scindée en 3 branches, deux cheminements piétonniers, une chaussée centrale en béton armé réservée à la circulation des navettes, un terre-plein d'ancrage pour l'accès aux secours au pied des remparts surmonté d’un gué en béton submersible lors des grandes marées permettant au mont de conserver son insularité 20 jours par an lors des grandes marées. Côté île, le Couesnon doit être chenalisé de part et d’autre du mont.
Depuis 2014, les visiteurs peuvent se rendre au mont par les nouveaux ouvrages d'accès.
L'ilôt de Tombelaine
Située dans la baie, il fait partie de la commune de Genêts, à 2,5 kms du mont Saint-Michel. Il est plus grand av ec 4 ha mais moins élevé que ce dernier, son sommet le Pic de la Folie culmine à 45 m au-dessus du niveau de la mer.
Au Xème siècle, une chapelle est bâtie sur le rocher et les moines du Mont Saint-Michel y édifient un manoir.
Au XIème siècle, deux moines, Anastase et Robert, quittent le Mont Saint-Michel pour s'y retirer en ermites. En 1137, le 13ème abbé du Mont, Bernard du Bec dit le Vénérable (+1149) y fonde un prieuré et l'îlot devient un lieu de pèlerinage. L'église est dédiée à Notre-Dame de la Gisante ou Notre Dame de Tombelaine.
L'îlot est fortifié en 1220.
Au cours de la Guerre de Cent Ans au XVème siècle, une garnison anglaise d'une centaine d'hommes s'y installe en 1423, mais ils ne parviennent pas à occuper le Mont défendu par 119 chevaliers. L'ïlot est repris par les Français en 1450.
Sous le roi Louis XIV (1638/1715), l'îlot est la propriété de son surintendant des finances Nicolas Fouquet (1615/1680, portrait de gauche) jusque son arrestation et la confiscation de ses biens en 1661. Il transforme le prieuré en château, y ajoute quelques bâtiments, releve les parties ruinées, et y entretient une garnison.
Quelques années plus tard, les constructions de Tombelaine sont presque entièrement détruites.
Tombelaine est pris par surprise en 1562 par Gabriel Ier de Lorges (1530/1574), comte de Montgommery, devenu le grand chef des Huguenots après avoir blessé à mort le roi Henri II (1519/1559) qui le garde jusque sa mort.
En 1592, Tombelaine fait soumission au roi Henri IV (1153/1610).
En 1666, ordre est donné par le roi Louis XIV de détruire château et forteresse sur Tombelaine. Après la destruction des bâtiments dont il ne subsiste que la chapelle du prieuré, alors dédiée à Notre-Dame et à sainte Apolline, l'îlot est rapidement abandonné de ses habitants. Les fraudeurs de la côte et de Jersey trouvent dans les ruines un asile où ils cachent les produits de leur contrebande.
Au début du XXème siècle, l'antique église disparait. Un sémaphore est élevé sur ses ruines, aujourd'hui également disparu. Il subsiste encore trois tronçons de tours ruinées, des murs de courtine, une rampe d'accès, la base du château ou du donjon sur le pic le plus élevé, et l'emplacement de la chapelle.
Le site est acheté par l'Etat en 1933 et classé aux Monuments Historiques en 1936 et 1987.
L'auberge de la mère Poulard
La Mère Poulard fait partie de l’histoire du Mont- Saint-Michel. En 1888, Annette Boutiaut (1851/1931) accomplit son rêve en ouvrant une auberge au Mont-Saint-Michel, au cœur de la cité médiévale. Très vite reconnus, les talents d’Annette lui valent le titre honorifique de Mère, distinguant ses grandes qualités de cuisinière et sa contribution à la renommée et à la tradition culinaire de la France, La Mère Poulard est née.
Annette, fille de maraîchers de Nevers, entre à Paris au service d'Edouard Corroyer (1835/1904), architecte élève de Eugène Viollet-le-Duc (1814/1879), en qualité de femme de chambre puis de cuisinière. Édouard Corroyer est un fin gourmet qui reçoit beaucoup. Il détecte rapidement les talents de cuisinière d’Annette. En 1872, il est nommé par le gouvernement pour restaurer l’abbaye du Mont. Annette découvre le Mont avec Édouard Corroyer et sa famille. En 1873, Edouard aide Annette et Victor Poulard, fils de boulanger originaire du Mont, à organiser leur mariage à Paris pour remercier la jeune femme des années passées à son service. La même année, Annette et Victor Poulard font l’acquisition de l’hôtel Saint-Michel Teste d’Or au Mont. Annette y réinterprète la cuisine bourgeoise, lourde et chargée en sauce appréciée d’Édouard, pour une cuisine simple et légère, pleine de goûts, de saveurs et de couleurs, à partir des produits de la baie, entre terre et mer, entre Normandie et Bretagne.
Quelques années plus tard, Victor et Annette quittent l’hôtel Saint-Michel pour acquérir l’hôtel du Lion d’Or qu'ils démolissent et remplacent par le bâtiment actuel, d’abord sous l’enseigne À l’Omelette renommée de La Mère Poulard puis Auberge La Mère Poulard.
A la fin du XIXème siècle, Annette tient l’auberge de main de maître et ne quitte jamais ses fourneaux.
Au début du XXème siècle, le roi Édouard VII (1841/1910) et la Famille royale d’Angleterre, hôtes assidus de l'auberge, le président des États-Unis Théodore Roosevelt (1858/1919) et le président du Conseil Français Georges Clémenceau (1841/1929), grand ami d’Annette, contribuent à la renommée de l'auberge.
Pour le centenaire de la création de l'auberge, l'entente cordiale entre le Premier ministre Anglais Margaret Thatcher (1925/2013) et le président de la République Française François Mitterrand (1916/1996) est célébrée autour d'une omelette.
Pour Paul Bocuse (1926/2018), pape de la cuisine française, La Mère Poulard, c’est la France !
Patrimoine
L'église Notre-Dame-sous-Terre
Elle est édifiée vers 900 et ses agrandissements successifs finissent par absorber la totalité de l’église d'origine jusqu’à la faire oublier, avant sa redécouverte lors des fouilles de la fin du XIXème siècle et du début du XXème siècle. Restaurée dans les années 1960, cette chapelle offre un remarquable exemple d’architecture préromane carolingienne. Sa salle voûtée en berceau divisée depuis son origine en deux nefs par un mur médian percé de deux larges arcades, qui a soutenu, avant leur écroulement, trois des piliers de la nef romane de l'église actuelle. Les chœurs de Notre-Dame Sous-Terre sont surmontés d'une tribune servant probablement à la présentation des reliques aux fidèles rassemblés dans les nefs, tout en évitant leur vol. Les arcs sont construits en briques plates assemblées au mortier, selon la technique carolingienne. Les bâtiments abbatiaux romans sont ensuite élevés à l’Ouest et au-dessus de l’église carolingienne.
La salle est conservée pour son rôle symbolique car elle est à l'emplacement même de l'oratoire construit par saint Aubert en 708 où sont placés sur un autel dédié à la Sainte Trinité dans le vaisseau occidental de l'église : le squelette de l'évêque Aubert ainsi que le morceau de marbre sur lequel saint Michel aurait posé son pied, une parcelle de sa cape rouge, une épée et un bouclier qui lui aurait servi à terrasser le dragon (Satan). Ces reliques sont dispersées en 1791 par les révolutionnaires pour récupérer l'or et l'argent des reliquaires.
L'église abbatiale
Elle est bâtie au sommet du Mont, à 80 m d’altitude, et repose sur une plateforme constituée de cryptes adossées à la pointe du rocher. Les trois cryptes construites entre 1031 et 1047 servent de fondations : la chapelle des Trente-Cierges, sous le bras du transept Nord ; la crypte des Gros Piliers, qui soutient le chœur, à l'Est; la chapelle Saint-Martin, sous le bras du transept Sud. Ranulphe de Bayeux, abbé du Mont de 1063 à 1085, commence l’édification de la nef sur Notre-Dame-Sous-Terre en 1060.
En 1080, trois étages de bâtiments conventuels de style roman sont édifiés au Nord de Notre-Dame-sous-Terre : la salle de l'Aquilon sert d'aumônerie et accueille les pélerins, le promenoir des moines et le dortoir. Le cellier et l'aumônerie sont entamés. La nef est éclairée à l'aide de couronnes de lumière riche en couleurs contrastant avec le dépouillement actuel.
Mal consolidés, les bas-côtés Nord de la nef s’écroulent sur les bâtiments conventuels en 1103. Ils sont reconstruits de 1115 à 1125 sous l'abbé Roger II (+1123).
En 1421, le chœur roman s'écroule. Il est reconstruit en style gothique flamboyant entre 1446 et 1450, puis de 1499 à 1523, sur la crypte des Gros-Piliers. Cette crypte qui n'est pas consacrée au culte possède dix piliers, dont huit gros, cylindriques, d’une circonférence de 5 m, sans chapiteaux, qui lui donnent son nom.
À la suite d'un incendie en 1776, les trois travées occidentales de la nef sont démolies et une nouvelle façade est édifiée en 1780 dans le style néo-classique. Elle se compose d'un premier niveau avec une porte centrale entourée de deux portes latérales et des colonnes engagées ornées de chapiteaux de réemploi. Un bandeau sert d'appui aux fenêtres surmontées d'un arc en plein cintre. L'étage est également rythmé de colonnes engagées à chapiteaux d'ordre dorique. Un fronton triangulaire couronne l'entablement de cet étage, terminant la travée centrale de part et d'autre de laquelle les travées latérales s'amortissent en murs-boutants qui aboutissent aux colonnes terminées par des pyramidions qui s'inspirent du style retour d'Égypte.
L'incendie de l'atelier des prisonniers installé dans la nef en 1834 dévore entièrement la charpente des combles et les parois des murs, endommage les sculptures et les chapiteaux, ceux actuels datant du XIXème siècle.
Autour du déambulatoire s'ouvrent 7 chapelles rayonnantes. Deux d'entre elles contiennent des bas-reliefs en pierre de Caen datant du XVIème siècle. Un petit bateau suspendu est un ex-voto réalisé par un des prisonniers du Mont au XIXème siècle à la suite d'un vœu ou en mémoire d'une grâce obtenue. Le pavage en terre cuite vernissée du chœur est réalisé en 1965 pour remplacer d'anciens carreaux de ciment.
L'abbaye fait l’objet d’un classement au titre des Monuments Historiques en 1862 et doublement inscrit sur la liste du Patrimoine Mondial de l’UNESCO, en 1979 sous l'intitulé Mont Saint-Michel et sa baie, et en 1998 sous Chemins de Compostelle en France.
L'Histoire de l'abbaye
L'Histoire commence en 708, lorsque l’évêque Aubert fait élever sur le Mont Tombe un premier sanctuaire en l’honneur de saint Michel. Les chanoines du Mont-Saint-Michel sont, durant le premier siècle de leur institution, fidèles au culte de l’archange : leur montagne est à la fois un lieu de prière, d’étude et de pèlerinage, mais l’ère de stabilité connue par la Neustrie durant le règne de mon ancêtre l'empereur Charlemagne (747/814) laisse place à une période de grands désordres. Profitant de la désunion des petits-fils de Charlemagne, les raids et incursions des Vikings, précédemment contenus, reprennent une nouvelle vigueur. Les Vikings atteignent le Mont-Saint-Michel-au-péril-de-la-Mer en 847 et mettent à sac l'église collégiale.
En 966, des bénédictins s’y installent à la demande de mon ancêtre le duc de Normandie, Richard Ier dit Sans Peur (933/996). Ces moines, sous l’autorité de l’abbé Maynard Ier (+991) respectant la règle de saint Benoît, dotent l'abbaye de l'église pré-romane à double nef de Notre-Dame-sous-Terre, puis font construire à partir de 1060 la nef de l'église abbatiale dont la croisée du transept est établie sur le sommet du rocher. Très vite, l’abbaye devient un lieu de pèlerinage majeur de l’Occident chrétien mais aussi un des centres de la culture médiévale où sont produits, conservés et étudiés un grand nombre de manuscrits.
Le contexte historique, politique et économique durant tout le Moyen Âge influe grandement sur l’ouverture des chantiers et sur les moyens mis en œuvre. Au cours des siècles et au gré des incendies, effondrements, reconstructions, changements de fonction, ou de restitutions, l’abbaye se transforme.
En 1204, l'abbaye est incendiée par les troupes de Guy de Thouars, seuls, les murs et les voûtes résistent et échappent à l'embrasement. Reconstruit dans le style architectural normand, avec tailloirs des chapiteaux circulaires, écoinçons en pierre de Caen et motifs végétaux, le cloître de la Merveille est achevé en 1228.
En 1356, les Anglais, installés sur le rocher de Tombelaine, commencent le siège de l'abbaye, mais Bertrand du Guesclin, capitaine de la garnison du Mont, écarte la menace. En 1433, un incendie ayant détruit une partie de la ville, les Anglais en profitent pour attaquer l’abbaye.
En 1421, le chœur roman de l’église s’effondre, il est totalement reconstruit un siècle plus tard dans l’élan de l’art gothique flamboyant.
En 1509, l'abbé Guillaume de Lamps fait édifiée sur la flèche une figure de saint Michel dorée. La flèche est renversée par la foudre en 1594.
Symbole national de résistance contre les Anglais, le prestige de l'abbaye décline néanmoins : le Régime de la Commende institué en 1523 par le roi François Ier (1494/1547) finit de la ruiner, même si des rois continuent de venir en pèlerinage au Mont et qu'il reste un enjeu lors des Guerres de Religion. Les Huguenots tentent de s'emparer de ce bastion de la Ligue Catholique en 1577.
En 1622, la réforme de la Congrégation de Saint-Maur installe de nouveaux religieux dans l’abbaye. Ils réaménagent le lieu et tentent de relancer la vie monastique et les pèlerinages.
Au XVIIème et XVIIIème siècles, le Mont est déserté par ses abbés commendataires.
A la Révolution Française, les propriétés de l’église sont déclarées Biens Nationaux, les moines sont chassés et le Mont Libre devient une prison pour les prêtres réfractaires en 1793.
En 1794, un dispositif de télégraphe optique, système de Chappe, est installé au sommet du clocher, maillon de la ligne télégraphique Paris-Brest.
En 1835, les élèves d'Eugène Viollet-le-Duc sont chargés de restaurer ce chef-d’œuvre de l’art gothique français.
En 1877, des fêtes grandioses célèbrent le couronnement de la statue de saint Michel, 25 000 pélerins sont présents.
Le clocher et la flèche, qui ont subi les orages, la foudre et l'incendie à douze reprises, sont reconstruits entre 1892 et 1897 dans des styles caractéristiques du XIXème siècle, néo-roman pour le clocher, néogothique pour la flèche. La tour romane est démontée pour être renforcée. La flèche donne au Mont sa silhouette pyramidale actuelle. L’archange Saint Michel qui couronne la flèche est définitivement achevée en 1898 mais connaît curieusement la même indifférence médiatique que l'édification de la flèche. Trois pointes de paratonnerres fixées au bout des ailes et de l'épée permettent d'écarter le danger de la foudre.
En 1898, l'architecte en chef des monuments historiques Paul Gout (1852/1923) redécouvre, lors de fouilles sous le plancher de l’église, Notre-Dame-Sous-Terre qui est complètement dégagée en 1959.
Les Prisons de l'abbaye
Des légendes prétendent que des abbés y ont aménagé des cachots dès le XIème siècle. Une prison d'État est attestée sous le roi Louis XI (1423/1483) qui fait installer dans le logis abbatial roman une fillette, cage de bois et de fer suspendue sous une voûte.
Le relâchement des mœurs des moines malgré la réforme en 1622 par les moines de la Congrégation de Saint-Maur et le manque d'entretien, font que le roi Louis XV (1710/1774) en 1731, transforme une partie de l'abbaye en prison d'État. Elle gagne son surnom de Bastille des mers où sont emprisonnés notamment l'écrivain Victor Dubourg de La Cassagne (1715/1746) qui y meurt ou l'acteur-homme de lettres Pierre Jean Baptiste Choudard dit Desforges (1746/1806).
Dès 1793, plus de 300 prêtres réfractaires y sont incarcérés.
En 1832, Les prisonniers, ultraroyalistes ou républicains, dénoncent les mauvais traitements et se liguent contre le directeur de la prison, Martin des Landes, qui est remplacé.
L'abbaye, devenue Centrale Pénitentiaire en 1810, prend en charge des détenus condamnés à de longues peines. Jusqu'à 700 prisonniers, hommes, femmes et même enfants travaillent dans des salles de l'abbaye transformées en ateliers, confectionnant notamment des chapeaux de paille. En 1834, un incendie attisé par la paille s'y déclare.
Après la détention de socialistes tels que Martin Bernard (1808/1883), Armand Barbès (1809/1870) et Louis Auguste Blanqui 1805/188(1), divers intellectuels dont Victor Hugo (1802/1885), dénoncent l’abbaye-prison dont l'état de délabrement rend les conditions de vie insupportables. Fermée en 1863 sur ordre de l'empereur Napoléon III (1808/1873) cette maison de force et de correction a vu passer 14 000 détenus. Les 650 prisonniers d'État et détenus de droit commun sont alors transférés sur le continent.
Cette utilisation pénitenciaire a pour mérite de sauver l’abbaye de la destruction, mais elle laisse le monument dans un état de délabrement avancé.
En 1817, les nombreuses modifications effectuées par l’administration pénitentiaire sont la cause de l’écroulement de l’hôtellerie édifiée autrefois par l'abbé Robert de Torigni (1110/1186).
L'église paroissiale Saint-Pierre
Elle est enserrée au sein du village sur le flanc Est du rocher et s'appuie à l'Ouest contre le rocher. Le cimetière de la commune la borde au Sud et l'église communique à l'Est avec la Grand'rue par son abside principale en encorbellement qui assure le passage voûté d'une venelle.
Fondée au VIIIème siècle par l'évêque d'Avranches, Aubert, pour lui servir de lieu de sépulture. Elle est dédiée à saint Pierre, prince des apôtres, mentionné dans une charte de 1022. De la période romane, l'église conserve notamment les piliers à impostes de l'entrée du chœur.
Vers 1390, le vaisseau central de l'édifice est doublé d'un vaisseau latéral. L'église possède alors un clocher peigne au-dessus du pignon oriental du vaisseau principal de la nef.
Dans la seconde moitié du XVème siècle, l'église est profondément remaniée : les absidioles du transept sont remplacées par des chapelles plus profondes à chevet plat et une tour de clocher est édifiée au Sud.
Vers la fin du XVIème siècle, le chœur est agrandi par la construction d'une abside à pans coupés.
L'église paroissiale devient sanctuaire de pèlerinage en 1886, et le culte de saint Michel est transféré de l'abbatiale par décision de l'évêque de Coutances.
À l'origine, le rez-de-chaussée de la tour-clocher ouvre sur l'extérieur pour permettre le passage entre l'église et le cimetière. À la fin du XIXème siècle, sans doute à l'initiative des Pères de Saint-Edme de Pontigny qui assurent la présence religieuse au Mont depuis la fermeture de la prison d'État, est condamné et transformé en chapelle dédiée à saint Michel. Cette chapelle est la seule à être voutée de pierre.
Les différentes parties de l'édifice sont couvertes de charpentes lambrissées, refaites au début duXXème siècle par trois architectes des Monuments Historiques. Les couvertures sont restaurées à la même époque en ardoises d'Angers posées au clou de cuivre. Ces couvertures se sont altérées dans le temps et une nouvelle campagne de restauration est lancée en 2003.
L'église est classée dans son intégralité au titre des Monuments Historiques en 1909.
Une statue de Jeanne d'Arc est installée et bénie en 1909 par l'Archevêque de Rouen. Elle rappelle que la sainte avait entendu la voix de Saint Michel la poussant à courir au secours de la France.
L'église a conservé ses fonts baptismaux du XIIIème siècle qui sont classés au titre des Monuments Historiques en 1907. La cuve de granit, monolithe, de forme polygonale, présente un décor sobre d'arcatures trilobées.
Le maître-autel, surmonté d'un fronton semi-circulaire, date du XVIIème siècle et présente un retable flanqué de colonnes corinthiennes en bois peint, faux marbre et or. Il est inscrit au titre des Monuments Historiques en 1990.
Dans la chapelle Saint-Michel, l'autel et la statue de l'archange à feuilles d'argent repoussé sur âme de bois de 1873 est transféré de l'abbaye en 1895. Il est protégé au titre des Monuments Historiques en 1976. La statue fait rapidement l'objet d'un culte important et Giovanni Maria Mastai Ferretti (1792/1878), pape Pie IX, décide en 1875 de lui accorder les honneurs du couronnement. La couronne est réalisée avec les bijoux offerts par les fidèles et est attribuée à la Maison Mellerio de Paris.Elle est volée en 1906 dans la sacristie du sanctuaire, celle actuelle est ornée de verroterie. De part et d'autre de l'entrée de la chapelle, deux statues en bois du XVIIème siècle de saint Aubert et saint Roch sont inscrites, au titre d''objets, aux Monuments Historiques en 1974.
L'église renferme également du mobilier funéraire dont le gisant, sous un enfeu, d'une femme identifiée comme étant dame Jacquet, représentée avec son époux sur un vitrail de la chapelle Nord du sanctuaire. Cette statue tombale date du XIVème siècle et fait l'objet d'un classement, au titre d'objet, aux Monuments Historiques en 1907.
Le cimetière
La découverte du cimetière médiéval en 2017, révèle que le cimetière d'origine s'étend sur un rayon de 30m autour de l'église paroissiale. Une trentaine de sépultures sauvegardées sont à l'étude et doit apporter des précisions quant à la population du village avant le XIIIème siècle.
Actuellement le cimetière est de proportions réduites, les sépultures se répartissent sur deux terrasses dont l'une, très étroite, n'accueille que cinq tombes. Un jardin du souvenir est aménagé à l'extrémité Sud de la parcelle basse. Le cimetière et son enceinte sont classés au titre des Monuments Historiques en 1934.
Au Sud de l'église, la croix de granite du XVIème siècle est inscrite au titre des Monuments Historiques en 1974.
Côté Nord, le monument aux morts de la Première Guerre Mondiale porte huit noms et l'inscription Aux enfants du Mont-Saint-Michel morts pour la France, qu'ils reposent en paix.
Côté Ouest, sur la paroi extérieure du mur d'enceinte du cimetière, exposées verticalement, cinq dalles funéraires sont datées du premier quart du XVIIème siècle.
Les remparts
À l'origine, seule une palissade en bois protège le mont, à l'exception de l'abbaye qui est dotée d'une fortification en pierre. Après le rattachement de la Normandie en 1204 par le roi Philippe II dit Auguste, l’île est ravagé par une armée bretonne qui massacre les habitants. L'abbé et les moines décident de ceinturer l'île d'une fortification. Dans le cadre de la Guerre de Cent Ans, au XVème siècle, le dispositif défensif est renforcé et amélioré, les Anglais ne réussissent jamais à enlever la place.
La muraille se compose de courtines flanquée de tours semi-circulaires et d’une tour bastionnée : la tour du Roi, près de la porte d'entrée ; la tour de l'Arcade ; la tour de la Liberté ; la tour Basse ; la tour Cholet ; la tour Boucle bastionnée ; la tour du Nord construite après 1254.
Le chemin de ronde et les parapets sont du XVème siècle et divers ouvrages de défense comme : la porte de l'Avancée de 1530 ; la porte du Lion ; la poterne du Trou du Chat ; la porte du Roi et sa barbacane dues en 1430 au capitaine du mont Louis d'Estouteville (1400/1464) ; le corps de garde des Bourgeois du XVIème siècle; l'éperon de la tour Boucle, la porte de l'Avancée et la Tour Gabriel sont l'oeuvre de Gabriel du Puy, lieutenant du mont pour le roi François Ier au XVIème siècle.
Les remparts urbains encore visibles aujourd'hui sont essentiellement construits sous le 31ème abbé du mont, Robert Jollivet (+1444) qui fait allégeance en 1421 au roi Henri V d'Angleterre (1386/1422).
L'enceinte de la ville et ses dépendances sont classées au titre des Monuments Historiques en 1875, et inscrites sur la liste du Patrimoine Mondial de l’UNESCO.
L'enceinte des Fanils
Elle fait partie des fortifications et comprend la tour Gabriel complétée en 1928 par une caserne destinée à abriter les gardiens de la prison ayant investi l'abbaye après la Révolution Française.
L'ensemble est également classé au titre des Monuments Historiques en 1875, délimité par arrêté de 1904.
Le logis de Tiphaine
Au XIVème siècle, le chevalier Bertrand du Guesclin (1320/1380) s’illustre durant la première partie de la Guerre de Cent Ans. Sa bravoure, sa combativité, son sens de l’organisation et du commandement le font passer du grade de capitaine à celui de grand connétable des armées du Royaume de France (voir § Les personnages).
Il fait construire pour sa première épouse Tiphaine de Raguenel (1335/1373) noble dame, fille de Robin III de Raguenel, seigneur de Châtel-Oger et héros du Combat des Trente, et de Jeanne de Dinan, vicomtesse de La Bellière, une demeure au Mont Saint-Michel qui est, en ces temps dangereux, l’une des places fortes les plus sûres et les mieux protégées du royaume.
La légende fait de leur union un exemple d'amour courtois entre une femme aussi belle, cultivée et fidèle que son mari est laid, illettré et absent.
Tandis que Bertrand s’illustre sur les champs de bataille, Tiphaine, qui est astrologue, lit dans les étoiles le destin du monde.
Cette demeure historique construite en 1365 présente le cadre de vie d’un chevalier du Moyen-âge avec son mobilier d’époque, l’armure du chevalier et le cabinet d’astrologie de son épouse.
Cette propriété appartient actuellement au marquis Philippe du Guesclin de Saint-Gilles.
Les façades et les toitures sont inscrites au titre des Monuments Historiques en 1928.
La chapelle Saint-Aubert et la légende
Bâtiment rectangulaire avec un toit à deux pentes et deux petites fenêtres en plein cintre dont le pignon est surmonté d'une statue de saint Aubert (660/725), situé sur une excroissance rocheuse à l'extrémité Nord-Ouest du Mont.
La chapelle est érigée vers le XIIème siècle, probablement sous l'abbé Robert de Torigni (1110/1186), en l'honneur de saint Aubert.
La Légende raconte qu'après avoir été le témoin du combat entre l'archange saint Michel et un dragon, débuté sur le mont-Dol et achevé sur le mont Tombe, l'évêque Aubert d'Avranches a une vision dans son sommeil par trois fois dans laquelle l’archange Michel lui ordonne d’édifier une église sur l’île rocheuse à l’embouchure du Couesnon à l'endroit où il a vaincu le Malin. Ce rocher escarpé, aride et solitaire, s'élève dans une baie formée par la réunion des côtes de la Normandie et de la Bretagne.Vu l'état de cette pointe rocheuse, à peine rattachée au continent, couverte de broussailles et de ronces et seulement habitée, outre les bêtes sauvages, par quelques ermites, il juge cela impossible et pense à un artifice du Malin. Cependant, à la troisième injonction, il obéit après que l'Archange, afin de mettre fin à ses hésitations, appuit fortement le doigt sur son front, y laissant son empreinte. Aubert se réveille au matin avec ce creux sur le front et comprend la véracité de l'ordre archangélique.
Des événements providentiels le guident alors dans sa tâche : un rond de rosée, un matin de septembre, lui indique la forme ronde de l'oratoire, un taureau étrangement attaché en montre l'emplacement.
Une source d'eau douce est découverte à proximité (l'emplacement correspond aujourd'hui à la fontaine Saint-Aubert). Un puits est creusé et la place nivelée. Une pierre cultuelle païenne sur l'emplacement est renversée par un fermier nommé Bain et ses douze fils, grâce à l'intervention de son dernier né, tenu dans les bras d'Aubert, qui appuit l'enfant contre la pierre.
À la mort de saint Aubert, son corps est probablement placé dans un sarcophage de pierre, comme le veut la coutume mérovingienne et, selon ses vœux, placé dans le chœur du Mont-Saint-Michel, la tête vers l’autel, les chanoines gardant son crâne et son bras droit comme reliques.
Le chanoine Bernier cache les ossements d’Aubert dans les combles de sa demeure en 966, peut-être pour protéger ces reliques des attaques des Vikings. Entre 1009 et 1023, les moines de l'abbé Hildebert Ier trouvent un squelette avec un crâne troué dans une cabane d'ermite, il est placé sur un autel dédié à la Sainte-Trinité, dans la nef occidentale de l'église Notre-Dame-sous-Terre. Dès lors, les bénédictins vénérent ces reliques, dont la perforation du crâne au niveau pariétal est identifiée comme la marque de la pression de saint Michel sur la tête d'Aubert.
Le crâne est sauvé de la Révolution Française en 1792 par un médecin, Louis Julien Guérin qui prend prétexte de sa qualité de médecin pour récupérer à des fins d'étude la relique du crâne. La paix revenue, il la restitue au clergé avranchais. En 1856, ce crâne est transféré à la basilique Saint-Gervais-et-Saint-Protais d'Avranches, où il est conservé depuis dans son trésor.
La chapelle est classée au titre des Monuments Historiques en 1908.
Faits divers
L'histoire de Mathurin Bruneau
Fils d'un sabotier de Vezins, Mathurin Bruneau (1784/1822) devient orphelin à l'âge de 7 ans et est recueilli par l'époux de sa sœur aînée, un sabotier de Vihiers nommé Delaunay qui le chasse bientôt de chez lui en raison de sa paresse et de son mauvais esprit, condamnant le jeune garçon à errer et mendier à travers la campagne du Maine-et-Loire.
En décembre 1795, Mathurin Bruneau commet sa première imposture en se faisant passer pour le fils du baron de Vezins, disparu lors de la Guerre de Vendée. Il dupe la vicomtesse de Turpin de Crissé dont il prétend être le neveu et est accueilli au château d'Angrie. Démasqué, il est cependant gardé comme domestique par la vicomtesse qui le chasse 6 mois plus tard. Il trouve une nouvelle fois asile chez son beau-frère, auprès duquel il apprend le métier de sabotier, il le quitte en 1799 affirmant qu'il compte faire son tour de France.
Arrêté en 1803 à Saint-Malo pour vagabondage, il est écroué au Dépôt de Mendicité de Saint-Denis, d'où il est relâché quelques jours plus tard. Il se rend alors au Mans puis à Lorient pour s'enrôler en 1804, comme aspirant-canonnier dans le 4e régiment d'artillerie de la marine. Embarqué sur la frégate La Cybèle, il déserte à Norfolk en 1806 et vit quelques années aux États-Unis, passant de Philadelphie à New York, où il exerce divers métiers. Il y a même, selon ses dires, fondé une famille. Pendant ce temps, le conseil de guerre, siégeant à Lorient, le condamne par contumace à 7 ans de travaux forcés.
De retour en France en 1815, il recommence à usurper des identités de personnes disparues : après l'échec de la présentation d'un passeport américain au nom de Charles de Navarre, il se fait passer pour le fils, mort en Espagne, de Mme Phelipeaux. Hébergé pendant 15 jours chez une veuve de Varennes-sur-Loire, il réussit à lui soutirer 600 francs. Arrêté en décembre, il est emprisonné à la maison de Bicêtre de Rouen en 1816. Pendant cette incarcération, il se fait raconter un roman intitulé Le Cimetière de la Madeleine qui relate l'enlèvement imaginaire du dauphin de sa prison du Temple.
Grâce à la complicité de codétenus dont il fait ses secrétaires, il fait connaître ses prétentions à l'extérieur, parvenant à convaincre de nombreuses personnes que le véritable fils de Louis XVI, de retour de son exil américain, est enfermé au Bicêtre de Rouen. Il essaye d'entrer en contact avec la duchesse d'Angoulême, sœur du prince dont il revendique l'identité.
Jugé par le tribunal correctionnel de Rouen en 1818, il est déclaré coupable d'escroquerie, de vagabondage et d'outrage à magistrat et condamné à purger une peine de 7 ans de prison, à l'issue de laquelle il sera remis à l'autorité militaire pour être jugé en tant que déserteur.
Ayant continué à correspondre avec ses partisans, il est transféré en 1821 à la maison d'arrêt de Caen puis, dès le lendemain, au Mont-Saint-Michel, où il meurt en 1822 d'une attaque d'apoplexie.
Les personnages liés à la commune
Bertrand du Guesclin (1320/1380, portrait de gauche), chevalier, connétable de France et de Castille, personnage majeur de la première partie de la Guerre de Cent Ans.
Il est le fils aîné des 10 enfants de Robert II du Guesclin (1300/1353), issu de la branche cadette d'une Famille noble de Bretagne, seigneur de La Motte-Broons dans le Pays Gallo ou il réside dans un modeste manoir avec son épouse Jeanne de Malesmains (+1350).
Bertrand est placé en nourrice et élevé parmi des paysans jusqu'à l'âge de 5 ans. Son portrait peu flatteur le présente ainsi : petit, les jambes courtes et noueuses, les épaules démesurément larges, les bras longs, une grosse tête ronde et ingrate, la peau noire comme celle d'un sanglier. Une chanson dit de lui qu'il est l'enfant le plus laid qu'il y eût de Rennes à Dinan. Sa laideur et sa brutalité lui valent l'opprobre parental et une chronique dit de ses parents qu'ils le détestaient tant, que souvent en leur cœur ils désiraient qu’il fût mort ou noyé dans l’eau courante.
Vers l'âge de 6 ans, une femme juive convertie, versée dans la chiromancie, lui prédit la gloire et désormais il est traité avec égards. Il se fait remarquer par sa force, son habileté dans les exercices du corps et ses goûts belliqueux avec ses compagnons de jeunesse. Il assiste à un tournoi sur la place des Lices à Rennes en 1337, un de ses cousins, vaincu, quitte la lice et lui prête son équipement, masqué, il défait une quinzaine de chevaliers avant de refuser de combattre son père en inclinant sa lance par respect au moment de la joute, à la grande surprise de l'assemblée qui s'interroge sur l'identité de ce chevalier sans blason. Un seizième chevalier le défie et parvient à faire sauter la visière de son heaume, son père découvre le visage de son fils, ému et fier, il s'engage à l'armer.
Il se fait remarquer dès le début de la Guerre de Cent Ans et gagne le respect de la noblesse à la pointe de son épée. Adoubé chevalier en 1357, il prend alors pour devise Le courage donne ce que la beauté refuse.
Il participe à la guerre de succession de Bretagne, puis à la première guerre civile de Castille. Il est nommé capitaine de Pontorson et du mont Saint-Michel et devient celui que les Anglais craignent, Le Dogue noir de Brocéliande. Sous son commandement, la Normandie, la Guyenne, le Saintonge et le Poitou sont libérés de l’emprise des Anglais.
Son sens de l’organisation et du commandement le propulse du grade de capitaine à celui de connétable des armées du Royaume de France en 1370.
Il habite dans une belle demeure du Mont avec son épouse Tiphaine de Raguenel (voir § précédent), astrologue, qui lit dans les étoiles le destin du monde et prédit à son époux les résultats de ses batailles. Après la mort de celle-ci, il se remarie en 1374 avec Jeanne de Laval-Tinténiac (+1437) dans la chapelle du château de Montmuran dont il devient propriétaire par alliance.
En 1380, pris d'une forte fièvre durant le siège devant Châteauneuf-de-Randon (Gévaudan) il meurt. Son décès est attribué à la consommation d'eau glacée pendant les chaleurs de l'été. Le jour même le 13 juillet, le gouverneur de la ville vient déposer en hommage les clefs de la place sur son cercueil. Son corps est déposé à l'abbaye royale de Saint-Denis.
Il inspire, des années plus tard, les 119 chevaliers défenseurs du Mont qui s’opposent victorieusement aux armées anglaises.
Louis Auguste Blanqui (1805/1881, portrait de droite) surnommé l'Enfermé, est un révolutionnaire socialiste français. Il défend pour l'essentiel les mêmes idées que le mouvement socialiste du XIXème siècle et fait partie des socialistes non-marxistes.
Après 1830, encore étudiant, il fait le constat que la Révolution ne peut traduire la volonté du peuple que par la violence, l'interdiction politique qui place le peuple sans garantie, sans défense, devant l'odieuse domination des privilégiés, conduit fatalement à la lutte. Il est, en conséquence de ses tentatives insurrectionnelles, emprisonné une grande partie de son existence, ce qui lui vaut son surnom.
En 1840, il est condamné à mort mais sa peine est commuée en prison perpétuelle, il est enfermé au Mont-Saint-Michel. Sa femme, Amélie Suzanne Serre, meurt en 1841 alors qu'il est emprisonné. En 1844, son état de santé lui vaut d’être transféré à la prison-hôpital de Tours. Il est gracié par le roi Louis Philippe Ier (1773/1850).
En 1880, il publie le journal Ni Dieu ni Maître dont le titre devient une référence pour le mouvement anarchiste.
Frappé d'une congestion cérébrale en décembre, ses amis, notamment Georges Clémenceau (1841/1929) et Edouard Vaillant (1840/1915), viennent à son chevet. Il meurt le soir du 1er janvier 1881. Ses obsèques au cimetière du Père-Lachaise, à Parissont suivies par 100 000 personnes. Il est inhumé . Son disciple, Eudes, et Louise Michel lui rendent hommage.
Armand Barbès (1809/1870, portrait 2 de droite) militant Républicain Français, opposant à la Monarchie de Juillet.
Avec Louis Auguste Blanqui, il appartient au Panthéon républicain et bénéficient tous deux d’une réputation de révolutionnaires intransigeants. Les deux hommes se côtoient depuis 1836 et se connaissent bien.
À la suite des événements de la journée d'insurrection du 12 mai 1839 durant laquelle les Républicains de la Société des Saisons tentent de renverser le roi Louis Philippe, il est condamné à la détention perpétuelle et rejoint Louis Auguste Blanqui au mont Saint-Michel, alors prison d'État froide et ventée. En 1842, ils participent à une tentative d'évasion, est repris et subit le cachot, les Loges. Souffrant d'une phtisie laryngée, il est transféré à la prison de Nîmes. Libéré par la Révolution, puis de nouveau incarcéré en 1848, avant d'être amnistié en 1854 par l'Empereur Napoléon III (1808/1873). Il part comme exilé volontaire en Hollande ou il meurt.
Evolution de la population
Nos lointains ancêtres du Mont Saint-Michel
Carte de Cassini
Sources
Sites, blogs, livres et revues.... : Wikipedia. A la rencontre de Tombelaine de Patrice Trèche.
Photographies : Teddy Verneuil, David Ademas, Stéphane Geufroi, Bruno Morandi, Olivier Dralam...
Date de dernière mise à jour : 12/12/2021