Moûtiers
Moûtiers est située, au confluent de l'Isère et du Doron de Bozel, au cœur de la vallée de la Tarentaise dont elle est la capitale.
Elle est la porte d'accès de la haute-vallée de la Tarentaise et de plusieurs grandes stations de ski françaises, dont Courchevel, Méribel, Les Menuires, Valmorel, et Val Thorens.
La commune est jumelée avec Verrès, Val d’Aoste (Italie).
Héraldique
Les armes de la commune se blasonnent ainsi : Parti, au premier de gueules aux deux clefs d'or passées en sautoir, liées du même, au second d'or à l'aigle bicéphale de sable, becquée, membrée et couronnée de gueules.
Le blason de Moûtiers date du XIVème siècle.
L'écu se divise en deux parties : à dextre, il représente les clefs, symbole de l'apôtre Pierre, patron du diocèse et de la cathédrale de la cité, et à senestre l'aigle bicéphale.
Toponymie
Elle s’appelle d’abord Darantasia signifiant les eaux vives en celte. Elle donne son nom au diocèse et à la province de Tarentaise. Située près d’un monastère en 996, la cité prend le nom de Monasterium, puis de Munsterium, de Moustiers, et enfin de Moûtiers.
Elle est rebaptisée Mont-Salins de 1792 à 1796.
Histoire
Un écrit rapporte que Saint Honorat de Lérins ou d’Arles (365/429) vient, au commencement du Vème siècle, dans le bourg de Centron (Montgirod).
Une des deux voies romaines, Alpis Graia, partant d'Aoste pour aller en Gaule en franchissant les Alpes, passe par le Petit-Saint-Bernard, puis descend la haute vallée de l'Isère par Bourg-Saint-Maurice, Aime, et Moûtiers en traversant le Pays des Ceutrons (peuples gaulois qui contrôlent les cols alpins du Petit et du Grand Saint-Bernard).
Une lettre du pape Saint Léon Ier dit le Grand (390/461, portrait de droite) datée de 451 permet d'affirmer qu'il y a un évêque à Darantasia pour le diocèse de la Tarantaise qui correspond au territoire de la civitas Ceutronum.
Saint Jacques d'Assyrie (+429), moine de Lérins et secrétaire de Saint Honorat, évangélise la Tarantaise et bâtit une église qu'il dédie à Saint Pierre et y fait édifier un château-fort. C’est le premier évêque de Tarentaise.
Le premier évêque de Moûtiers est Sanctius qui assiste au concile d'Épaone en 517, et reconstruit l'ancienne église Saint-Pierre, devenue trop petite, consacrée par Saint Avit (450/518), archevêque de Vienne.
Les Sarrasins s’établissent à La Garde-Freinet au début du VIIIème siècle jusqu’en 793. De là, ils mènent des razzias sur le territoire des Alpes et tiennent les cols. A cette époque, l'église construite par Sanctius est détruite.
Par le précepte d'Agaune daté de 996, le roi des deux Bourgogne, Rodolphe III dit le Pieux (966/1032, portrait de gauche) donne le comté de Tarantaise à l'archevêque Amisus. Il est probable que cet évêque entreprend la reconstruction de la cathédrale.
Le 11 octobre 1792, la commune de Moûtiers vote en faveur du rattachement à la France révolutionnaire, la Nation française venant d'occuper par la force des armes tout le territoire du duché de Savoie.
En 1793 : Moûtiers est renommée Mont-Salins par ordre du représentant du peuple, Antoine Louis Albitte (1761/1812) à compter du 25 vendémiaire an II de la République française. Le représentant du peuple, Gauthier, abroge cette obligation le 3 janvier 1796 : les communes reprendront leurs anciennes dénominations, nonobstant tous arrêtés contraires, jusqu'à ce qu'elles aient été autorisées par décret. Elles sont néanmoins tenues d'en supprimer autant que faire se pourra, tout ce qui a quelque rapport au fanatisme et à la féodalité.
Dans la prison révolutionnaire de Mont-Salins, on trouve le 10 fructidor an II : 8 prêtres, 11 nobles, 2 capucins, 2 religieuses, 2 filles, 20 paysans, tous suspects.
Le 22 brumaire an III, figure sur les registres d'écrou : Le laboureur Martinet ; Petit-Cœur, 74 ans, accusé d'avoir tenu des propos inciviques en payant à boire à un militaire ; Michel Hugues, 50 ans, accusé d'avoir refusé des assignats ; la veuve Cognié, 30 ans, accusée du recel d'une cloche pesant 2 quintaux...
En 1794, une croix élevée dans le cimetière en infraction à la loi du 23 ventôse an III, est détruite.
L’archidiocèse de Moûtiers-Tarentaise est supprimé à la suite du concordat du 2 avril 1802 qui crée l'évêché de Chambéry-Genève. De 1825 à 1966, la cathédrale est le siège du diocèse de Tarentaise jusqu'à ce qu'un décret du Saint-Siège unisse les trois évêchés de Chambéry, de Moûtiers et de Saint-Jean-de-Maurienne en un évêché de Chambéry, Maurienne et Tarentaise.
Pour des raisons militaires de protection de la frontière, la construction de la ligne de chemin de fer Saint-Pierre-d'Albigny/Bourg-Saint-Maurice après l'Accord de Triple Alliance entre l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie et l'Italie, est entreprise en 1880. Le train arrive à Moûtiers en 1893 et dessert Bourg-Saint-Maurice en 1913.
Les Salines Royales de Moûtiers
Depuis le Moyen Âge, on a produit du sel à Moûtiers.
Sous la Renaissance, le duc Emmanuel Philibert de Savoie dit Tête de Fer (1528/1580, portrait de droite) organise la production industrielle des salines de Moûtiers.
Au XVIIIème siècle, les Etablissements Industriels des Salines Royales produisent plus de 1000 tonnes de sel dans l'année, dans cinq bâtiments de graduation situés entre l'Isère et le Doron. Le chevalier Charles François de Buttet (1738/1797, portrait de gauche), Inspecteur général des Salines de Tarentaise , est nommé en 1770 directeur des Salines Royales de Moûtiers par le roi Charles Emmanuel III de Sardaigne (1701/1773), à qui il soumet le projet d'un nouveau procédé de cristallisation du sel. Le système consiste à filtrer les eaux salines au travers de fagots de branchage, en ralentissant le courant, et ensuite à les faire couler lentement sur de longues cordes de chanvre disposées dans des bâtiments industriels. Il suffit au dernier stade, de racler les cordes pour en extraire le sel.
Ce procédé permet une large augmentation de la production de sel en Savoie.
A la suite de l'Annexion de la Savoie en 1860, les activités des Salines commencent à péricliter en raison, d'une part de la perte du monopole de la vente de sel et, d'autre part, de la concurrence de la production de sel du Midi de la France. Il ne reste plus que 26 ouvriers.
Les Salines Royales de Moûtiers s’arrêtent en 1866 et il ne subsiste plus aujourd'hui que les vestiges de bâtiments.
En 1989, la Municipalité a donné le nom du chevalier de Buttet au pont qui se trouve à proximité du quartier des Salines Royales.
Patrimoine
La cathédrale Saint-Pierre
Il ne reste rien de la cathédrale initiale. Le premier texte mentionnant la cathédrale est celui de l'homélie prononcée par Saint Avit, archevêque de Vienne, dans la cathédrale reconstruite par Sanctius, évêque de Darantasia (Moûtiers), vers 517. Des fouilles entreprises au XIXème siècle ont permis de retrouver un bâtiment circulaire au chevet de la cathédrale.
La cathédrale primitive est vraisemblablement détruite par les Sarrazins.
Rodolphe III dit le Pieux (966/1032), roi des deux Bourgogne, fait des archevêques de Tarentaise des comtes de Tarentaise en 996. Le royaume de Bourgogne de Conrad II dit le Salique (990/1039) est intégré au Saint-Empire romain germanique. Les archevêques de Tarentaise deviennent des princes d'Empire. Ce titre leur donne des moyens financiers importants leur permettant de reconstruire leur cathédrale.
Au XIème siècle, l'archevêque entreprend de reconstruire la cathédrale ainsi que l'évêché au Sud, le long de l'Isère, et le cloître au Nord, sur la place. La partie orientale est construite vers 1020, la partie occidentale et la nef vers 1050.
De la cathédrale romane, il ne reste que le chœur et l'abside. De la nef, subsiste le mur gouttereau Sud. Seules deux des quatre tours subsistent. Le chœur, jadis entouré de deux tours, ne conserve que celle septentrionale faisant office de clocher.
Elle est restaurée par l’archevêque, Pierre II de Tarentaise (1102/1174), entre 1141 et 1174. Il dote la nef de voûtes de pierre.
En 1454, le cardinal Jean d'Arces (1370/1454), archevêque-comte de Tarentaise, fonde la chapelle des Innocents dans la cathédrale et reconstruit une partie de la cathédrale dans le style gothique.
Vers 1670, l'archevêque François Amédée Milliet de Challes et d’Arvillars (1623/1703), marquis de Challes, seigneur de La Poepe, transforme la cathédrale pour la rendre conforme à la liturgie définie au concile de Trente : destruction de la crypte, réalisation de baies dans les croisillons du transept pour l'éclairer, construction de la coupole avec lanternon à la croisée du transept. Les fresques du chœur sont recouvertes par un enduit. Des éléments de ce décor sont mis au jour en 1882.
En 1686, le porche à l'entrée de la cour est construit. Il est détruit au moment de la Révolution Française et reconstruit en 1864.
En 1792, la cathédrale devient Temple de la Raison.
En 1793, le représentant en mission, Antoine Louis Albitte, fait raser les clochers car ils dérogent au principe d'égalité. Malheureusement, ces travaux de démolition entraînent l'affaissement de la charpente et les voûtes romanes et gothiques s'effondrent le 24 décembre 1794.
En 1825, le nouvel évêque, Mgr Antoine Martinet (1776/1839, portrait ci-contre), s’installe dans une cathédrale ruinée. De 1827 à 1829, est entreprise la restauration-reconstruction de la cathédrale qui est bénite le 31 octobre 1829 et consacrée le 3 juillet 1831.
En 1869, une chapelle latérale est construite sur le bas-côté de la nef.
En 1882, une crypte romane est reconstituée et fait disparaître la décoration du XVIIème siècle dans le chœur.
Elle est classée aux Monuments Historiques en 1862.
Le pont Saint-Pierre où vieux-pont traverse l’Isère. Il est construit en 1785 et est classé au titre des Monuments Historiques en 1980.
L'évêché de Tarentaise est construit au XIVème siècle et reconstruit en 1610.
La Tour Ouest conserve des meurtrières du XIVème siècle dans sa partie haute.
L’ancien appartement de l’évêque dont il reste le salon principal du XVIIème siècle comportant une série de peintures retraçant la Parabole du bon samaritain. La pièce contiguë, un salon du XVIIIème siècle, transformée en chapelle épiscopale vers 1940, témoigne de la présence des derniers évêques de Tarentaise.
Cette partie est classée aux Monuments Historiques en 1980.
Les façades et les toitures ; la galerie à arcades sur la cour ; le passage voûté du rez-de-chaussée ; le couloir intérieur voûté du premier étage sont inscrits aux Monuments Historiques en 1980.
Depuis 1996, l’archevêché, propriété de la commune de Moûtiers, est devenu le Centre Culturel Marius Hudry, du nom d'un prêtre tarin, important historien de la vallée et de la Savoie.
Au rez-de-chaussée, le Musée des Traditions Populaires présente la vie d’autrefois en Tarentaise.
Le monument aux Morts de la Guerre de 1914-1918 est réalisé par le statuaire Philippe Besnard, et inauguré en 1922. Il représente La France ailée et casquée à genoux.
La commune possède deux espaces verts : le parc de la Mairie et le jardin de l'Évêché.
Personnages liés à la commune
Nicolas Oudéard (1645/1692), artiste-peintre savoyard, décorateur d'églises, maître du baroque savoyard a réalisé de nombreuses peintures murales et des tableaux. Il résidait à Moûtiers.
Pierre Joseph de Rivaz (1711/1772, portrait 1 de droite), ingénieur et historien de Savoie. Nommé comme ingénieur aux Salines Royales, il meurt à Moûtiers le 6 août 1772.
Charles François de Buttet (1738/1797), chevalier de l'ordre des Saints-Maurice-et-Lazare, membre de l'Académie des Sciences de Turin, ingénieur sous les règnes des rois Charles-Emmanuel III et Victor-Amédée III, inspecteur général des Salines de Tarentaise, directeur des Salines Royales de Moûtiers (voir § ci-dessus).
Jean Pierre de Ransonnet-Bosford (1744/1796, portrait de gauche), général de brigade de la Révolution Française. Il meurt le 3 mars 1796 à son poste de commandement à Moûtiers.
Le comte Hyacinthe Fidèle Avet (1788/1855) nait le 24 avril 1788 à Moûtiers dans une famille bourgeoise de Tarentaise. Il est magistrat, sous-préfet de Tarentaise durant l’occupation française, puis intendant de la province de la Haute-Savoie à la suite de la restauration du duché. Il devient membre de l'Académie de Savoie en 1824.
Anselme Boix-Vives (1899/1969, portrait 2 de droite), artiste-peintre autodidacte d’origine espagnole.
De sa jeunesse de berger catalan, il a gardé le souvenir flamboyant de la nature. Venu s'installer en France à l'âge de 18 ans, il y exerce divers métiers avant d'ouvrir un commerce de fruits et légumes à Moûtiers en 1926.
Au milieu des années 1950, il entame un projet utopique qu'il porte toute sa vie, un plan de paix mondiale, manifeste à l'appui.
En 1962, à la mort de sa femme, il arrête son commerce et se consacre à la peinture. Durant 7 ans, il produit plus de 2 000 œuvres colorées, fortement expressives et originales, où la figure humaine, aux traits souvent simiesques, se mêle à des végétations luxuriantes.
Visionnaire prophétique et inspiré, il est, de toute évidence, l'un des artistes majeurs de l'Art brut.
Il meurt le 24 août 1969 à Moûtiers où il est inhumé.
Hameaux, lieux dits et écarts
Champoulet, La Chaudanne, Les Cordeliers, Les Salines, Montgalgan, Planvillard.
Evolution de la population
Notre lointain ancêtre de la noblesse de Moûtiers ...
Décès/inhumations :
De SAVOIE Humbert II dit Le Renforcé (sosa 943 395 242++G30), 6ème comte de Maurienne, décède à Salins le 14 octobre 1103 dans son château. Il est inhumé à la cathédrale Saint-Pierre de Moûtiers.
(Voir « Visages de Savoie »).
Carte Cassini
Ce département ne figure pas dans la carte de Cassini de 1760.
Sources
Sites et photo : Wikipedia...
Date de dernière mise à jour : 07/09/2019